Revue écrite par
PAULINE VERMARE,
Commissaire adjointe, International Center of Photography
La photographie de mariage est un exercice délicat qui requiert à la fois une immense souplesse, un œil avisé, et beaucoup d’humour et d’empathie. Dans son essai, Carole fait preuve de toutes ces qualités: elle a su capturer cette grande fête avec beaucoup de talent, de sensibilité et de professionnalisme.
La qualité des images est très bonne dans l’ensemble, avec des images plus fortes que d’autres, mais aucune mauvaise photo, et certaines excellentes. La première photographie du portfolio est excellente : le cadrage, légèrement décalé, la symbolique (nous sommes arrivés en haut des marches), les contrastes, le regard de la mère sur sa fille, ému, inquiet et heureux à la fois, la fierté du père et sa complicité (le style vestimentaire)…
J’aime aussi les changements de décor, le fait que Carole ait suivi le groupe dans la rue, par exemple – cela ajoute une dimension inattendue au reportage. Cette photographie, l’image 11, est forte dans ce sens, parce qu’elle se détache de l’histoire, apporte un élément de surprise : nous ne sommes plus dans la photo de mariage à proprement parler, mais dans une célébration plus universelle de l’amitié. Tout est magnifiquement rendu.
J’aime beaucoup la photographie numéro 10 également, cette fresque, comme une peinture antique, la cène ! J’aime le coup d’œil de cette convive à la photographe, intervention délicate qui apporte plus de réalisme à l’image, sans la rendre artificielle. La photographie 9, sous le viaduc, est très riche en matière. La spontanéité qui se dégage de cette photographie est très touchante. La photographie numéro 8 est pleine d’humour -et quel régal, cette myriade d’expressions capturées au bon moment ! Le flouté sur le côté gauche de la photo ne gêne pas, il ajoute une touche de chaos à la scène. La photo 13 est magnifique… rien à dire, car tout est dit !
Les photographies qui me semblent moins fortes sont celles qui ne me « frappent » pas autant que les autres, à commencer par la photographie numéro 7, qui est belle, mais qui manque paradoxalement d’intensité : le sujet est très touchant (un proche de la mariée ? en tous cas un beau passage de générations), la distance est bonne (on est proche), mais cette scène aurait sans doute été plus forte du côté de la mariée. Ce n’est pas une mauvaise photographie pour autant, simplement une question d’angle, de perspective, et peut-être aussi de fond : le contraste entre la scène principale et les spectateurs derrière (visiblement préoccupés par autre chose) nous empêchent de nous concentrer sur cette possible émotion.
En contraste, l’image 6 est beaucoup plus forte, précisément parce que l’émotion sur le visage de la mariée est magnifique. La photographie numéro 5 est bonne mais un peu classique, rien ne me frappe particulièrement. Pareil pour la photographie numéro 4.
L’image 3 en revanche, par son cadrage en contre plongée, est beaucoup plus forte, plus intense, et nous permet par ailleurs d’admirer tout un style, l’identité du mariage: les chaussures, les montres, une génération, une culture, surprenants de prime abord, et délicieux (des converses a un mariage, formidable !).
L’image 2 est très touchante, l’expression sur le visage du futur mari est très belle, et cette rangée d’amis qui l’entoure l’est tout autant – mais la photo est un peu surexposée, ce qui lui fait perdre en intensité.
Enfin, l’image 12 aurait été plus forte avec un cadrage plus serré, qui aurait mis la petite fille plus en avant.
Je félicite Carole pour ce beau travail, tout en finesse.
Techniquement rien à redire, un petit travail sur les cadrages sur certains sujets, mais la voix est bien là, comme les yeux et le cœur.